Tuesday, November 30, 2010
Monday, November 15, 2010
L'Italie
Je connais un refuge où apaiser l’esprit. L’endroit s’appelle Toscane. Sur le haut d’une colline entourée de vigne, j’ai trouvé la maison de Franco. La fille de Franco, Claudia. Sa femme Tina qui vient de la région de Le Crete. Son neveu Simone qui rit tout le temps. Et j’ai trouvé Franco. Mon ami Franco qui dit bonjour avec un verre de vin. Franco qui me parle en Italien et je comprend tout ce qu’il dit. Franco c’est l’Italie, la joie de vivre, le soleil sur les vignes, le vino de la casa. Il me fait l’acolade et parle parle parle de la pluie qui ne vient pas arroser ses vignes comme il voudrait, de bagnoles, de filles, du village voisin, du nouvel enfant de sa Claudia. Mais jamais de lui-même.
Au printemps, sa maison est entourée de lilas en fleurs qui embaûment tout le pays. La maison est si solide qu’on pourrait s’y installer forteresse. Franco me raconte que, pendant la guerre, tutta la familia se cachait dans les cabes à vin, des tunnels creusés dans la terre rouge de Toscane.
Tina a planté dans toutes les jardinières des pensées. Blanches. Jaunes. Rouges comme le vin de Franco que nous buvons sur la terrace ensoleillée. D’ici on peut voir jusqu’à Florence et jusqu’à Rome.
Je ne connais pas endroit où je prend tant plaisir à dessiner. Chaque détour de la route m’invente un nouveau sujet tout en verdure et en grâce. Nous nous y promenons sans trop savoir où nous conduira la journée et la plupart du temps, nous n’arrivons jamais à notre destination. Je m’arrête partout et m’abreuve à la Beauté de l’Italie. Collines. Arbres. Maisons. Femmes. Vieillards heureux à la peau cuirée.
Ici nous découvrons les caves d’un petit monastère où des Franciscains fabriquent des vins délicieux qu’ils mettent en vente sous la gouverne d’une jeune femme belle et brune. Il n’y a rien comme l’esprit monastique !
Écoute, les cloches sonnent l’angelus. Il est midi. Au bord du chemin étroit, les coquelicots font la fête du rouge. Devant, un faisan sort d’un buisson.
Je n’a besoin de rien que d’un crayon, d’un carnet et d’une boîte d’aquarelle. Pour le reste je m’accomode de ce qui vient: un morceau de fromage ou un plat d’osso buco.
Au flanc de la colline, là-bas, un troupeau de moutons broute à l’ombre des cyprès qu’on a plantés à la mémoire des garçons du pays qui sont morts à la guerre. Trop vite. Trop loin. Le chien berger anglais ne dort que d’un oeil.
À Québec, on me dit qu’il neige!
Nous entrons dans une petite trattoria pour le lunch. La jeune Italienne qui fait le service a du Botticelli dans les boucles noires de ses cheveux et dans la tendresse de son rire. La salle à manger est peinte en jaune, comme l’était celle de Monet.
Vers quinze heure, la pluie se met à tomber doucement et nous rentrons chez Franco.
Thursday, October 28, 2010
Octobre sur la Kenebec River
Rentré du Maine depuis trois jours. Les Apalaches me restent, me tiennent, m’agrippent. Paysages gris tachetés de noir et de couleurs. Si tendres ces paysages où je m’arrête ici et là pour mettre dans le carnet mémoire de la rivière Kenebec qui coule tout le long de la route entre The Forks et Skohegan.
À ce temps de l’année le regard se faufile, presque indiscret entre les arbres qui n’ont plus que leurs dernières feuilles.
Dans les villages dorment des maisons de planches blanches et vieilles. Sur les perrons, ou les pelouses négligées de grosses citrouilles préparent la fête de l’halloween où les vivants se racontent des histoires de fantômes qui font peur aux enfants.
Les couleurs d’octobre ne sont pas si violentes que les voudraient nos souvenirs. Elles sont feutrées et fort difficiles à peindre.
Après une longue journée devant une grande toile, je me retrouve le long de la rivière Kenebec. Paysage inventé mais fort évocateur de la Maine promenade du weekend dernier.
Une brouette rouge remplie de citrouilles parle d’abondance, de l’été heureux et doux que nous avons connu cette année. Il a fait beau tout juillet et tout au long du mois d’août. Les citrouilles ont grossi grossi. Elles racontent la générosité de la nature à qui on offre une toute petite graine et qui nous rend ces fruits énormes et gais même par le plus triste gris d’octobre.
Il ya aussi la maison où on a envie d’entrer. Ce n’est pas tout-à-fait une maison. Un atelier peut-être où un homme fabrique un meuble en bois qu’il offrira à sa fille pour Noël ou pour le jour de l’An...
Derrière une roche immense , une chaloupe en bois. Celle de mon père? La mienne qui ne vogue plus guère?
C’est un tableau qui ne parle pas tant d’octobre que du plaisir d’être avec toi, là-bas, loin de l’ici quotidien qui nous accapare et nous empêche d’être l’un à l’autre comme au bord de la rivière Kenebec.
Thursday, September 30, 2010
Wednesday, April 7, 2010
Prendre la douceur de vivre
La première consiste à m’entêter à corriger le tir, à retoucher, à me reprendre ici ou là dans le tableau pour l’amener là où je veux qu’il m’amène. L’autre solution est de tout blanchir, de repartir en neuf, à zéro. Tout reprendre. Parfois je prend la première solution parfois l’autre. Bien des gens possèdent de moi une toile qui en cache deux autres et n’en savent rien du tout.
La seule chose dont je dois me rappeler dans une telle situation c’est que je ne suis pas devant ma toile en train de finir un tableau mais de peindre… de vivre… de profiter de la vie dans cette tâche que j’ai choisi d’accomplir : celle de peindre.
Si je cherche à tout prix la solution à cette toile, je deviens vite frustré, fâché de l’avoir gâchée, perdue… J’efface un morceau et je reprend, j’efface encore, je repeins et souvent je m’y perd.
Si je regarde dehors le printemps qui s’installe et que je ne me prends pas au sérieux, j’arrive souvent à solutionner le tableau raté au départ. Ou je l’efface et je repars vers ailleurs. Libre. Je m’abandonne au ruisseau qui m’emporte et je me laisse aller à la vie. Rien n’est assez sérieux pour nous cacher le bonheur de vivre. Pas une toile en tout cas !
Claude A Simard
6 Avril 2010
Saturday, March 27, 2010
Friday, January 15, 2010
Thursday, January 14, 2010
Pourquoi donc faisons-nous des jardins?
Conférence à l'Association des petits jardins /
Nous faisons tous des jardins. Nous nous définissons comme des "jardiniers". Nous sommes des avocats, des menuisiers, des professeurs d'école. Nous sommes diététiste, policier, médecin, infirmière, ingénieur ou mécanicien. Mais nous sommes tous des "jardiniers". Et il y a des jours où nous rêvons d'une retraite, où nous ne serions plus mécanicien ou administrateur, ni médecin, ni policier. Mais quand nous pensons à fermer un jardin c'est pour en repartir un autre ... ailleurs... autrement... mieux. Il y a des jours où nous jurons qu'on ne nous reprendra plus à semer des capucines, à tuteurer des pieds d'alouettes, à biner le potager. Les jours de maux de dos. Les jours de pluie. Les jours d'automne quand le vent arrache tout en une nuit ou pire encore au matin de la première gelée quand on se lève et qu'il ne reste rien de tous les efforts de l'été. On jure qu'on ne recommencera plus. Promesses d'ivrogne. Nous semons à chaque printemps. Nous plantons toujours un autre rosier, même quand on s'était dit qu'on n'avait plus d'espace, qu'on allait alléger, réduire l'entretien. Et nous plantons des bulbes à chaque automne même si l'écureuil a tout mangé ceux qu'on avait plantés l'an dernier. Nous nous émerveillons à l'arrivée des catalogues en février quand on croyait que c'était bien fini et que jamais nous ne reverrions les étés, les juillets, les soleils. Quand on croyait que les journées n'allaient plus jamais rallonger... jamais. Nous voilà repartis à partir des semis jusqu'à en manquer de rebords de fenêtres.
Et pourquoi donc? Pourquoi faisons-nous ces jardins? Peut-être parce que nous aimons tant les rituels... et que le temps où nous vivons ne nous en a pas laissé gros de rituels. Nous n'avons plus de religion, plus de latin, plus de messe, plus de sermon qui nous donnaient matière à critiquer les dimanches midis. Sans parler des chapeaux que portait la voisine dans le banc d'en avant sans parler de sa fille aînée mariée depuis deux ans qui a toujours pas d'bébé. Plus de vicaire, plus de bedeau, ni marguillier. Plus de reposoir, plus de perron d'église, plus de clochettes qui sonnent toujours au même moment. Et nous qui aimions tant le grégorien! Faisons-nous des jardins parce que nous n'avons plus de rituels? De vêtements qu'il faut porter exactement à telle date et à telle heure chez celui-ci ou celles-là. Plus de chapeau et plus de gants. À peine encore une cravate et parfois un veston, pour les immenses occasions, les extrêmes mondanités, les rencontres ambitieuses pas emballantes. De nos jours, les femmes s'habillent comme des gars et même les gars s'habillent comme des filles. Vraiment, nous n'avons plus de rituel.
Et on ne se vouvoie même plus, non plus. Sitôt connu et sitôt "tu". On ne mange plus en famille. Les enfants ont grandi ou ils ont autre chose à faire ou ils n'ont plus le temps. C'est presque une occasion quand ils restent à souper. Et les promenades en voitures! Vous vous souvenez des promenades en voiture? Le dimanche. Après le lunch. Après la messe. Collet monté. Bien cravaté. Quand on allait voir grand-maman. Bon admettons qu'il y avait des rituels qui ont bien fait de disparaître. Mais le jardin! Ahhhhhh! le jardin! Parlez-moi donc d'un rituel. Tout un! Plein de magie et de mystères et de miracles. Une heure à désherber, ça vaut bien la grand messe et pour les indulgences, on offrira un mal de dos ou une jambe qui déplie pas! Une pousse qui pointe, ça vaut presque la nuit de Noël. J'ai dit presque. Ne me lapidez pas! Et quand le soleil t'éclaire tout ça au petit matin, avouez que ça vaut bien des bénédictions. À croire que quelqu'un là-haut approuve des changements et nous préfère à genoux dans sa terre.
Nous en avons des rituels dans le jardin. Des gestes répétés toujours pareils qui nous rassurent quand rien ne veut rester pareil que tout le temps, tout change, tout bouge. Des gestes qu'on fait en prenant le temps de les faire. Des gestes heureux. Nous en avons des rituels dans le jardin. Avec des accessoires en plus. Objets du culte aurait-on dit jadis. Des pelles et des râteaux. Des bêches et la bineuse. Oui, oui, je sais, le vrai mot c'est binette, mais chez nous voyez-vous, on dit une bineuse. - Tu as vu la bineuse? - Dans la remise. - Dans la remise? Oui dans le cabanon, la remise, la shed selon qu'on vient d'en haut ou du mauvais bord de la voie ferrée... La remise, c'est un sanctuaire. Un refuge. Cent fois mieux qu'un grenier quand on avait cinq ans. La remise. Des odeurs de terre et de pots de grès. Poussiéreuse. Trop petite. Toujours trop petite. Partout trop petite. Une vraie sacristie, la remise. Oui, ça doit être pour le rituel qu'on se fait des jardins! Ou bien pour se garder "en forme" puisque c'est à la mode. Pour l'exercice. Pour la bonne fatigue quand on se couche le soir. Parce qu'on mange un peu trop? Parce qu'on boit un peu trop? Nous sommes tous la preuve que le jardin, c'est très bon pour la forme. Presque tous. Enfin, la plupart d'entre nous.
Dans le jardin, on marche, on creuse, on se plie, se déplie. On se penche, on se relève, on force et on soulève, on transporte. C'est bon la vie de jardinier. Bon pour le corps. Bon pour l'esprit... comme disait un vieux jardinier. C'est pour ça qu'on se fait un jardin. Pour jouer! Comme on faisait quand on était petit. Tout petit. Faisons-nous des jardins pour retomber en enfance quand on en a assez d'être un adulte? Ou faisons-nous des jardins pour se souvenir? Dans mon jardin, il y a les pivoines de mon père et celles de ma tante Thérèse. Il y a les iris versicolores que je cueillais pour ma mère dans les champs chez Grenier. Les iris dont elle faisait des bouquets aussi bleus qu'éphémères. Dans mon jardin, il y a deux sapins que mes filles ont un jour rapportés de l'école. Il y a l'Angleterre. La Hollande. Dans mon jardin, il y a ma femme qui m'a tout appris des jardins. Des potagers d'abord et des jardins fleuris ensuite. Qui m'a appris la patience. Qui m'apprend toujours la patience. Dans mon jardin, il y a tous ceux qui sont passés dans mon jardin et qui n'y reviendront jamais. Mais que j'y attendrai toujours. L'odeur des rosiers, le chant des mésanges. Nous faisons des jardins pour ne jamais oublier. Peut-être un peu aussi pour les bravos. Les applaudissements. Les rappels. Les "comment faites-vous pour faire pousser des pavots bleus?". Les ohhhhhhs! Les ahhhhhhs! Parce qu'on est plus ni jeune, ni blond, ni grand. Parce qu'on chante faux et qu'on ne sait pas jouer de la guitare. Ou peut-être faisons-nous des jardins pour se faire pardonner de n'avoir pas fleuri l'hiver si froid. Faire un jardin pour se nourrir? Pour se distraire? Non, ça c'est pour les amateurs. Nos jardins à nous, c'est joliment plus important que ça!
La couleur du jardin
Dans la création et l'entretiren de son jardin, un jardinier se voit confronté à un grand nombre de questions auxquelles il trouvera les réponses dans le quotidien du jardin lui-même.
J'estime que l'horticulture ressemble beaucoup à la création artistique dans sa raison d'être et dans les cheminements qu'elle impose.
Généralement, l'individu qui décide de "faire un jardin" est en quête de beauté, comme le peintre qui ébauche une toile, comme le sculpteur qui arrache les premiers éclats de la pierre. Comme l'artiste, c'est en faisant son oeuvre qu'il apprendra les techniques requises au succès de sa démarche d'une part. D'autre part, c'est en faisant son oeuvre qu'il précisera sa pensée jusqu'à la forme définitive que prendra son jardin à un moment précis dans le temps.
Le véritable jardinier ne tient jamais son jardin comme une réalisation complète et finie. Chaque année, chaque saison, chaque semaine donne lieu à une vision nouvelle et éphémère, une oeuvre esthétique changeante. À l'intérieur d'une seule année, le jardin est transformé en une multitude de tableaux différents. Ils seront verts en été, rouge à l'automne, blancs en hiver et peut-être roses au printemps. Comme l'artiste qui reste insatisfait de ses créations, le jardinier cherche d'une saison à l'autre une vision nouvelle... meilleure. C'est probablement dans son insatisfaction même que réside sa motivation.
Les éléments de base de la création
L'impression créée par le jardin à un moment précis tient du terrain, des bâtiments, des murs, des végétaux et des accessoires apparents. Mais cette impression tient tout autant du temps qu'il fait, de l'heure qu'il est et de l'ensoleillement, de la température, de l'odeur, du bruit ambiant et de l'état d'âme du visiteur.
Nous faisons tous l'erreur de penser nos jardins en plan. Comme si on les regardait d'un avion. C'est un point de vue qui m'a été offert une seule fois en rentrant de voyage par un bel après-midi ensoleillé, il y a quinze ans. L'expérience n'a duré que quatre ou cinq secondes. Il vaut mieux penser le jardin en élévation. C'est de cette manière que nous observerons ses vistas saison après saison. C'est de cette façon que nous pourrons comprendre les rapports entre les divers éléments du jardin et atteindre possiblement à plus de satisfaction dans nos diverses expériences.
La couleur dans le jardin
Définitions
En concevant les vistas du jardin de la manière que nous venons d'exposer, nous créons un ensemble de tableaux correspondants aux divers points de vue de notre jardin. Les points de vue prévilégiés correspondront nécessairement aux lieux de vie les plus fréquentés tel une terrace.
Dans la planification de ces tableaux, nous porterons certainement une attention toute particulière à la couleur.
La couleur n'est pas une propriété stable inhérente à un objet. La couleur est l'effet produit sur l'oeil par la substance dont est composé un objet dans des circonstances précises. La couleur d' un objet varie selon divers facteurs dont l'éclairage, son voisinage et la capacité oculaire de la personne qui la perçoit.
Le processus de création est un processus de prise de decisions. Pour ce qui affaire à la couleur, une des premières décisions à prendre est à caractère quantitatif. Combien de couleur voulons-nous dans ce tableau. Cherchons-nous à créer un climat de calme ou avons-nous envie d'une fanfare dans la cour?
Le tableau monochrome est composé à l'aide d'une seule couleur. Les forêts du Canada sont de véritables scènes monochromes. Le vert y est présent sous diverses nuances. Il est assez rare qu'on fasse appel à la monochromie véritable en horticulture ornementale.
Toutefois, il est usage d'appeler jardin monochrome les jardins qui sont composés de plantes dont les fleurs sont toutes de la même couleur. On dit d'un jardin blanc que c'est un jardin monochrome. Un jardin de roses où les plants choisis sont tous à peu de la même couleur. Il ne faudrait pas oublier que cet arrangement tire sa force de la couleur du feuillage tout autant que de la couleur florale. En conséquence il serait plus exact de le considérer comme une bichromie.
La bichromie fait usage de deux couleurs. La trichromie emploie trois couleurs et la polychromie est sans limite.
Le cercle chromatique
Le cercle chromatique (des couleurs) est un instrument qui nous permet de comprendre les relations entre les couleurs.
La composition des couleurs
Les couleurs fondamentales (primaires) sont le jaune, le bleu et le rouge
Les couleurs composées (secondaires) sont le résultât du mélange des couleurs fondamentales.
Les couleurs complémentaires
Les couleurs dites complémentaires sont celles qui se font face sur le cercle chromatique.
Selon les "règles de l'esthétique", les couleurs complémentaires sont celles qui se marient le plus harmonieusement.
Il est intéressant de remarquer que les combinaisons complémentaires évoquent des fêtes populaires: le Rouge et le vert disent Noël. Le jaune et violet: Pâques.
Un tout petit peu d'histoire
On se demande parfois pourquoi certaines couleurs sont préférées à d'autres.
On constate que les couleurs les plus populaires sont les plus simples. Ce sont les couleurs inspirées de la nature. Le bleu (ciel et eau), le vert (végétation) et le rouge (végétation automnale).
Il faut savoir que depuis longtemps, on attribue des significations aux couleurs. Déjà, au moyen-âge, les chrétiens qui partaient en croisade pour délivrer les lieux saints occupés par les musulmans étaient identifiés par des blasons colorés selon un ensemble complexe de règles associées aux signification des couleurs.
Le rouge symbolisait charité, magnanimité, hardiesse, vaillance
Le vert symbolisait force. C'est une marque d'honneur, bonté, jeunesse.
Le bleu symbolisait justice. Il représente loyauté, pureté, fidélité. C'est la couleur de la vierge. C'est la couleur héraldique de la France.
Dans un livre de John Fleming intitulé "Meubles peints du Canada français", on relate qu'aux débuts de la colonie, les français attachaient à la couleur jaune des connotations négatives: lâcheté, maladie, cocuage. "Le jaune dénote inconstance, jalousie, adultère".
On raconte qu'en France, on badigeonnait de jaune la porte des traîtres. On me raconte qu'encore aujourd'hui, dans la région de Cap-Santé, au Québec, on emploie le terme "jaune" pour désigner les personnes sans courage. En langue anglaise, le terme "yellow" est encore en usage.
Est-ce pour cette raison qu'on hésite à employer des plantes à fleurs jaunes dans nos jardins contemporains? Une chose est certaine, c'est que la notion de beauté est relative. "Beauty is in the eye of the beholder" dit un proverbe anglais. Tous les goûts sont dans la nature. Il importe peu que les autres apprécient le jardin que nous créons. Le seul juge d'un jardin, c'est la personne qui le fait. Comme le seul juge d’un tableau, c’est l’artiste qui le peint.
Pour apprécier le jardin que nous avons fait,
il faut partir en voyage.
Nous portons beaucoup d'attention à chacune des tâches que nous faisons dans
le jardin. Tellement que les détails nous apparaissent à certains moments plus importants que l'ensemble. Il importe peu que le rosier fleurisse un peu moins, un peu plus que l'an dernier. L'important, c'est l'apparence globale de la roseraie.
Lorsque nous analysons une oeuvre d'art, nous la considérons dans son ensemble. Si nous observons ainsi, globalement, chacun des tableaux qui forment notre jardin , nous constaterons l'importance relative des éléments qui le composent tant au plan de la structure qu'à celui de la couleur:
Le ciel
Nous devons éviter l'erreur classique de croire que la plus grande partie d'une vue d'un jardin c'est la végétation. La couleur la plus importante de votre jardin, c'est le bleu du ciel... ou le gris du ciel... ou le blanc du ciel... ou le rose du ciel. Installez-vous à divers endroits dans votre jardin et regardez droit devant vous. Il est plus que probable que le ciel occupe plus de la moitié du tableau qui s'offre à vous. Il sera autrement, bien sur, si votre jardin est situé dans un terrain creux ou qu'il voisine une montage. C'est le cas des jardins Bouchart au creux d'une ancienne carrière de chaux dans l'île de Vancouver et des jardins de Monet situés au pied de la montagne de Giverny, en France. Dans ces jardins, la végétation s'étend bien au dessus de la ligne d'horizon.
L'architecture
Les bâtiments (résidence et dépendances) et les murs constituent des éléments très importants dans la plupart de nos jardins. Le jardin du célèbre Rockefeller situé dans l'ile de Mount-Desert dans le Maine est entouré d'un palissade d'une dizaine de pieds de hauteur de maçonnerie peinte en rose. Cet écran isole le jardin du monde extérieur et constitue un arrière-plan complémentaire à la végétation du jardin.
Dans une petite propriété, il faut tenir compte des éléments d'achitecture que nous ne pouvons pas contrôler parce qu'ils font partie de propriétés voisines. On devra en tenir compte dans la composition des tableaux ou checher à les cacher derrières divers écrans.
La verdure
La verdure est la troisième composante du jardin. Si on accepte le principe qui veut que l'intérêt émane de la diversité, on cherchera à diversifier les masses de verdure de manière à animer chaque tableau formé dans le jardin.
Les allées, les terraces et les piscines
Les surfaces non-jardinées contribuent pour une large part à créer l'ambiance, le style du jardin.
Mesurez la surface occupée par ces espaces et vous constaterez probablement qu'elles occupent une plus grande surface de votre propriété que les paltes-bandes et les pelouses additionnées.
Les plates-bandes florales
Les plates-bandes florales représentent la composante physique la moins importante du jardin au plan quantitatif.
Pourtant, sur le plan psychologique, elles sont la composante la plus importante du jardin. Les plantes florales sont en évolution constante. Elles poussent, elles fleurissent, portent des fruits et se flétrissent en quelques semaines. On les aime tant, non seulement pour leur grace formelle et pour leurs couleurs éclatatntes mais parce qu'elles nous apprennent les cycles de la vie, parce qu'elles nous aident à apprivoiser notre propre éphémérité.
Ceux qui cherchent en vain les plantes "qui fleurissent tout l'été" sont peut-être, au fond, en quête de leur propre éternité.
Regard global sur le jardin
Si nous apprenons à considérer l'ensemble de notre jardin, nous serons moins attristés par la rose flétrie, par le delphinium cassé par la bourasque de vent.
Je me souviens d'un enfant originaire de Blanc Sablon sur la Côte nord, qui, de passage à Québec découvrait les arbres pour la première fois et s'émerveillait devant l'immensité de ce qu'il appelait "une fleur".